A la veille de l’ouverture de la saison, Jean-Marc Pambet, président du numéro un mondial des articles de sports d’hiver a reçu Filière Sport au siège de la marque, à Metz Tessy, près d’Annecy. S’il voit l’avenir de Salomon dans l’outdoor, le groupe entend bien continuer d’investir sur les sports de neige.
Salomon est le leader mondial des équipements de sports d’hiver, mais vos autres activités représentent en 2011 la majorité de votre chiffre d’affaires. La diversification est-elle une condition de survie sur votre marché ?
En effet, il est essentiel pour une marque d’équipement comme Salomon d’être multicatégories et d’intégrer la chaussure et le textile. C’est un choix que nous avons fait il y a 20 ans, et qui s’est confirmé comme une stratégie gagnante. Notre force est double et tient à cette diversification « équipement – chaussure – textile » et à notre appartenance au groupe Amer Sports, qui met en place des synergies de produits et de commercialisation très fortes.
Qu’apporte le fait d’être multicatégories de produits ?
C’est essentiel en termes de notoriété, puisqu’aujourd’hui nous pouvons déployer la marque Salomon dans le monde entier et sur 365 jours auprès de tous les passionnés d’activités Outdoor.
En termes d’équilibre annuel, Salomon vend aujourd’hui aux consommateurs tout au long de l’année et pas seulement sur les quatre mois d’hiver, ce qui nous permet de renforcer nos relations avec nos partenaires de la distribution, avec qui nous travaillons au quotidien.
Est-ce l’Outdoor qui porte la croissance de la marque aujourd’hui ?
Oui, car le potentiel des marchés de l’Outdoor en chaussure et textile est bien plus important que celui du marché du matériel de sports d’hiver, avec des perspectives de croissance beaucoup plus dynamiques. Cela dit, nous sommes largement leader sur le matériel des sports d’hiver et nous avons l’ambition de renforcer ce leadership.
Les sports d’hiver restent au coeur de l’identité de Salomon…
Oui, nous trouvons dans le matériel de sports d’hiver les racines profondes de la marque. Cela reste notre ADN. C’est pourquoi nous alimentons continuellement le pipeline des nouveautés dans ces catégories de produits (BBR, Guardian…), avec des extensions importantes vers de nouveaux segments, par exemple les « protections » et de belles croissances en casques et masques.
Ainsi l’arbre Salomon poursuit sa croissance, toujours très ancré dans les sports de montagne, mais avec des dimensions « chaussure » et « textile » très marquées. La croissance du Trail Running est par exemple une belle branche de notre arbre, dont l’origine vient d’un prototype de chaussure « prêté » à une équipe du Raid Gauloise en 1998. Un proto qui donne naissance à un nouveau marché dimensionné aujourd’hui à environ un tiers du marché « Running ». Entre temps, beaucoup d’énergie et de créativité ont été dépensées ! Salomon cherche à faire progresser les sports de montagne. Quelques exemples : « twintip » (ski double spatule), skis courts de slalom, skiercross comme discipline olympique, le XHiking et le « multi fonctions » de l’Outdoor, les courses de trail aujourd’hui… Salomon a été pionnier dans toutes ces aventures.
Mais la part des sports d’hiver dans votre activité est-elle appelée à se réduire encore ?
Le chiffre d’affaires Salomon Sports d’hiver va continuer à croître mais sa part relative va baisser. Le potentiel chaussure et textile Outdoor rend en effet les perspectives de croissance de ces segments beaucoup plus dynamiques que la part « matériel de sports d’hiver ». Salomon a le potentiel pour devenir une marque de taille supérieure à 1 milliard d’€, à deux tiers de chaussure et textile Outdoor, et leader mondial du matériel de sports d’hiver.
À quelle échéance entendez-vous atteindre ce cap du milliard d’euros ?
C’est dans un horizon moyen terme. Et cela passe par une combinatoire : produit, dont notamment une phase d’accélération textile, distribution, avec élargissement du poids relatif en Amérique du Nord et en Asie, et contact consommateurs sur tous nos marchés et en relation avec tous nos clients partenaires de la distribution.
Qu’est-ce qui régit vos pratiques en matière de communication ? Trois axes de travail. Une présence en magasin complète et clairement mise en valeur qui rende facile l’acte d’achat. Une présence proactive sur les réseaux sociaux et le web. Et une marque au coeur de ses sports avec ses athlètes, ses pratiquants passionnés et ses organisateurs d’évènements.
Quel rôle jouent les magasins Salomon ?
Leur rôle est de mieux faire connaître l’étendue de notre offre aux consommateurs, notamment citadins, et ainsi de créer un effet d’entraînement auprès de nos partenaires de la distribution. Il est établi que là où nous avons des magasins, la demande consommateurs est plus importante localement.
Quels sont vos objectifs d’ouvertures de boutiques ?
Nous allons continuer à développer ce réseau car nous avons besoin de développer notre notoriété ainsi que l’exposition de notre offre et de notre marque à nos consommateurs.
Et ce dans un objectif clair d’accroître la notoriété de la marque et la demande pour le bénéfice de tous les détaillants proposant notre marque et nos produits.
Quelles sont vos priorités à l’international ?
Salomon réalise et depuis longtemps, 90 % de son chiffre d’affaires hors de France et 70 % en Europe. Nous sommes en train de développer la marque aux Etats-Unis et nous avons un potentiel grandement sous-exploité en Asie. Donc le cheminement reste simple : consolider notre base européenne et déployer notre potentiel en Amérique et en Asie. La dimension Amer Sports est alors stratégique pour notre développement car nous attaquons ces marchés commercialement en tant que Salomon et Amer Sports.
Dans sa dernière publication financière, Amer Sports annonce un plan de réduction des coûts. Salomon est-elle concernée ?
Amer Sports est en phase de croissance supportée par une stratégie matériel-chaussure-textile, multi marques et multi régions. Ce plan de réduction des coûts, qui est à l’échelle mondiale groupe, a pour objet de réaménager un certain nombre de domaines pour pouvoir mieux gérer des synergies et économies d’échelle, afin de concentrer nos investissements sur nos priorités de développement. L’Annecy Design Center, camp de base de Salomon et de Mavic, est concerné, comme tous les autres sites du groupe, par ce programme, et il porte tout autant un nombre important de projets stratégiques de croissance du Groupe.
Cela signifie-t-il que Salomon est en avance sur l’ensemble du groupe ?
Annecy est un pôle de pointe pour Amer Sports. Nous rassemblons sur notre plateau de l’Annecy Design Center deux marques en croissance de chiffre d’affaires et de résultat, Salomon et Mavic, et une plateforme d’expertise produit multi technologies et multi services, ainsi qu’un pôle d’expertise informatique, juridique et logistique européen pour Amer Sports. Nous sommes donc très impliqués dans la stratégie du groupe.
Nous avons ainsi repris il y a deux ans la responsabilité du développement des chaussures de tennis et badminton de la marque Wilson (appartenant au groupe Amer Sports, NDLR), c’est une activité nouvelle que nous sommes chargés de développer avec les premiers produits livrés en mars 2013. De même, l’équipe ski de fond d’Annecy développe l’offre « produit » des marques Salomon et Atomic. Le plateau d’Annecy, après être passé par des restructurations importantes en 2007, s’est enrichi d’activités nouvelles « produits et services » et déploie un énorme travail de grande qualité. Bravo à tous nos collaborateurs !
Les incertitudes de la conjoncture vont-elles influer sur votre gestion dans les mois à venir ?
Nous restons très prudents parce que nous sortons d’une année hivernale 2011-2012 plutôt mauvaise. Le printemps, l’été et l’automne qui ont suivis sont restés sous tension notamment en Europe. 2013 est une année à piloter très finement tout autant dans les décisions d’approvisionnement et risques de stock associés, que dans les programmes et investissements à déployer. Dans un univers économique incertain, nous continuerons d’investir mais nos choix seront plus stricts et priorisés.
Que vous inspire l’actuel débat sur la perte de compétitivité française ?
Travaillant avec des actionnaires internationaux et côtoyant beaucoup de collègues étrangers au comité exécutif d’Amer Sports, je peux témoigner que la France n’est pas considérée, hors de ses frontières, comme un territoire facile. La perception étrangère est simple: « La France est très productive et créative mais reste compliquée ». C’est vrai en matière sociale comme dans la vie quotidienne : les collaborateurs étrangers qui viennent s’installer ici peuvent en témoigner. Si nous voulons motiver les actionnaires à maintenir ou accroître leurs investissements, cette perception nous oblige à l’excellence. Capitalisons donc sur notre savoir-faire, notre créativité et notre productivité !.
Olivier Costil